MÉTHODES MIXTES ET QUALITATIVES DE ONE HEALTH
4.6
Faire une estimation rapide ou entreprendre une étude qualitative chronophage
Maintenant que vous avez appris à connaître les méthodes qualitatives, lisez des extraits d’un article fictif tiré d’une étude utilisant une méthode d’évaluation rapide appelée étude des connaissances, des attitudes et des pratiques (CAP).
Les études CAP sont couramment utilisées. Nous vous invitons à lire le résumé et les extraits ci-dessous et à réfléchir aux questions suivantes :
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Quels sont les bénéfices de cette étude ?
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Quelles sont les défauts de cette étude et pourquoi ?
1. Résumé (fictif)
Il existe de nombreuses pathologies infectieuses transmises des animaux domestiques aux personnes. Ces zoonoses sont des virus, des bactéries, des parasites ou des champignons ainsi que des bactéries résistantes aux antibiotiques. Les allergènes ne sont pas considérés comme des zoonoses. Cependant, il existe peu d’informations sur les connaissances des propriétaires d’animaux de compagnie.
Nous avons voulu évaluer les connaissances, l’attitude et les pratiques des propriétaires d’animaux de compagnie. Pour cela, nous avons mené une étude par questionnaire auprès des propriétaires d’animaux de compagnie dans deux cours de dressage canin et parmi les propriétaires de chats de trois cliniques vétérinaires. Au total, 56 propriétaires d’animaux de compagnie ont accepté de participer (32 propriétaires de chiens et 24 propriétaires de chats) et ont été interrogés à l’aide du questionnaire structuré.
De plus, nous avons pris des notes de nos observations. Une découverte majeure a été qu’une majorité de propriétaires d’animaux compagnie (80,3%) pouvaient classer la rage parmi les zoonoses, mais seuls quelques-uns connaissaient au moins deux zoonoses (17,9%). La plupart des personnes interrogées pensaient que le risque de zoonoses provenant des animaux de compagnie était faible. Beaucoup croyaient à tort que se laver les mains régulièrement était suffisant pour prévenir les pathologies pouvant être contractées par contact avec les animaux de compagnie.
Seuls quelques propriétaires de chiens ont déclaré que leurs vétérinaires leur avaient fourni beaucoup de renseignements sur les zoonoses, alors que cette proportion était significativement plus élevée chez les propriétaires de chats (15,5% vs 83,3%). Toutes les personnes interrogées souhaitaient plus d’informations sur les zoonoses des animaux de compagnie. Les propriétaires d’animaux de compagnie utilisent apparemment toute une variété de noms différents pour les zoonoses lorsqu’ils ont été sondés.
Nous avons observé que la quasi-totalité des propriétaires de chiens ramassaient les excréments de leurs chiens (96,9%) et que 64,5% d’entre eux se lavaient les mains par la suite (cependant, il y avait une grande différence dans cette pratique entre les deux lieux de dressage).
En conclusion, les connaissances sur les zoonoses chez les propriétaires d’animaux compagnie étaient faibles. Des programmes d’éducation en santé publique sont nécessaires et les vétérinaires doivent mieux informer les propriétaires de chiens.
2. Extraits de méthodes et de documents (fictifs)
Les deux cours de dressage de chiens se sont déroulés pendant les semaines 32 et 33 de l’année 2015. Ils ont été organisés par les mêmes personnes mais dans des endroits différents (à 30 kilomètres de distance). Les trois cliniques vétérinaires de la région ont toutes été contactées et ont accepté de participer. Les propriétaires de chats ont été interrogés au cours de la même période (du 3 au 14 août 2015).
Une étude descriptive transversale utilisant des questionnaires a été conçue pour évaluer les connaissances, les attitudes, les pratiques et les croyances des propriétaires d’animaux de compagnie sur les zoonoses. Nous avons présenté l’étude à tous les propriétaires canins ayant suivi un cours de dressage et inscrit tous ceux qui étaient disposés à y participer (18 et 14 participants aux cours A et B, respectivement). Des entretiens ont été menés après le cours dans un restaurant voisin.
Pour les propriétaires de chats, les propriétaires qui se présentaient dans l’une des trois cliniques (16, 2 et 6 dans les cliniques A, B et C, respectivement) ont été invités à participer pendant que le vétérinaire attendait le prochain patient. Nous avons exclu les autres propriétaires d’animaux de compagnie tels que les cochons d’Inde ou les reptiles.
Le questionnaire comprenait 33 questions fermées et 8 questions ouvertes. Les questions ouvertes portaient sur les noms locaux utilisés pour les zoonoses et les pratiques locales. Nous avons observé et pris des notes sur les comportements des propriétaires. Nous avons, par ailleurs, pris des photos.
3. Extraits de résultats (fictifs)
3.1 Connaissances sur les zoonoses
Différentes sources d’information ont été signalées au moment de l’enquête. Il est intéressant de noter que les propriétaires de chats ont beaucoup plus souvent qualifié les vétérinaires comme source d’information que les propriétaires de chiens (15,5% contre 83,3%, valeur p de khi carré <0,001).
Connaissance des propriétaires d’animaux de compagnie en relation avec la zoonose (segmentée par les propriétaires de chiens et de chats)
3.2 Attitudes
La majorité estimait que le risque de zoonoses de leurs animaux de compagnie était minime (sur une échelle de 1 à 5). Cependant, lorsqu’ils ont été interrogés, presque tous ont déclaré qu’ils avaient peur de la rage et qu’ils voulaient plus d’informations sur les zoonoses des animaux de compagnie.
3.3 Pratiques
Nous avons observé que 31 propriétaires de chiens sur 32 ramassaient les excréments de leurs chiens, ce qui constitue une importante mesure de santé publique. Lorsque nous avons demandé aux propriétaires de chats s’ils ramassaient immédiatement les excréments de leurs chats, aucun d’entre eux n’a indiqué le faire, mais au moins 12% et 33% ont déclaré qu’ils nettoyaient la litière de leurs chats toutes les 24 et 48 heures, respectivement. Concernant les autres mesures d’hygiène importantes, nous avons observé que 64,5% des propriétaires de chiens se lavaient les mains après avoir ramassé les excréments avec un sac en plastique, une bonne mesure d’hygiène personnelle.
Cependant, nous avons constaté des différences au niveau de cette bonne pratique : parmi les participants inscrits qui ramassaient les excréments, 88,2% (15 sur 17) dans le cours A se sont lavé les mains, mais seulement 35,7% (5 sur 14) l’ont fait dans le cours B. Ce résultat était significatif (valeur de p exacte de Fisher de 0,007).
Par ailleurs, nous avons observé qu’une majorité de femmes se lavaient les mains. Nous avons également observé que les propriétaires de chiens étaient plus souvent des fumeurs.> Cela peut être un facteur prédisposant à la transmission de zoonoses par voie aérienne, telles que la tuberculose, et devrait être inclus dans la documentation éducative.
3.4 Croyances
Certaines personnes interrogées pensaient que la rage pouvait être soignée. Cependant, ils semblaient également confondre la rage avec une autre pathologie. Nous avons constaté que les propriétaires d’animaux de compagnie utilisaient des noms différents pour la même pathologie.
Noms que les propriétaires d’animaux utilisent pour les principales zoonoses chez les animaux de compagnie
4. Extraits d’une discussion (fictive)
Même si la majorité des propriétaires d’animaux de compagnie connaissaient la rage (et savaient qu’elle se transmettait par les morsures d’animaux), seulement 60,7% des personnes interrogées savaient qu’elle était causée par un virus. C’est pourquoi, tous ne savaient pas qu’elle pouvait être évitée par la vaccination des chiens et des chats. Plus important, nous avons constaté une croyance comme quoi il était possible de guérir de la rage.
Une des limites de cette étude est peut-être que nous n’avons pas pu évaluer davantage les relations entre une zoonose et ses noms locaux déclarés.
Vous conviendrez peut-être qu’il était bon que les auteurs aient associé différentes approches telles que l’observation et les entretiens par questionnaire pour évaluer les connaissances, les attitudes et les pratiques.
Nous ignorons pendant combien de jours les données ont été collectées sur un site de cours, mais on peut supposer que les 18 et 14 participants ont été interrogés en quelques jours puisque les enquêteurs étaient présents et ont reçu l’autorisation des organisateurs du cours de mener ces entretiens. Les résultats sont intéressants compte-tenu des connaissances étonnamment faibles sur les zoonoses. Ceci en dépit du fait que les auteurs ont rassemblé les noms utilisés par les propriétaires d’animaux pour les zoonoses. Cependant, nous ne savons pas vraiment si ceux-ci ont été évalués avant les entretiens, puis utilisés dans les questions.
Sinon, les chercheurs auraient pu évaluer ces noms locaux en parallèle avec la connaissance, par exemple, de la toxoplasmose et ce n’est qu’à ce moment-là que l’on a demandé aux participants comment ils appelaient la maladie causant tel ou tel symptôme. L’étude a conduit à une recommandation assez simple d’augmenter l’éducation des propriétaires d’animaux de compagnie. Cependant, nous n’apprenons pas grand-chose sur quels aspects particuliers des connaissances devraient être abordés et quels sont les meilleurs points d’entrée pour une information efficace sur les risques et la prévention, car la compréhension des problèmes à résoudre reste très superficielle.
Au cours des entretiens, les personnes ont tendance à donner des réponses qu’elles jugent exactes du point de vue de l’enquêteur ou des autres auditeurs si les entretiens ne sont pas menés en privé. Dans le cas d’entretiens dans des cliniques vétérinaires, il serait déplacé, par exemple, que le vétérinaire consulté soit présent. Lorsque les connaissances des personnes interrogées ne correspondent pas avec le modèle biomédical, elles sont souvent qualifiées de « croyances », car on ne dispose pas de plus d’informations sur les constructions socioculturelles et on peut trouver d’autres interprétations. Les connaissances locales pourraient constituer de précieux points de départ pour les campagnes d’information ou pour renforcer la résilience des communautés.
Repensez maintenant à ce que vous venez de lire. Qu’aimez-vous et où identifiez-vous les défauts ?
Dans la prochaine étape, vous en apprendrez plus sur les points forts et les pièges des études CAP.
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Université de Bâle